Mon road trip Domaines Barons de Rothschild à Bordeaux
Eric Kohler
Directeur Technique
En poste depuis 2016
Rencontré par Gerda au Château
Château Duhart-Milon
4ième Grand Cru Classé en 1855
Pauillac
Chapitre 3 : Duhart-Milon, la profonde carrure d’un Grand Pauillac
Pendant 3 jours consécutifs, j’ai eu l’immense plaisir de rencontrer les directeurs des Châteaux Duhart-Milon, l’Evangile et Rieussec.
Je finis mon road trip aux Domaines Barons de Rothschild à Pauillac, avec Eric Kohler du Château Duhart-Milon qui fait une très belle carrière de plus de 25 ans dans le groupe. Eric Kohler a commencé en 1994 comme Responsable Qualité, il évolue ensuite au poste de Directeur Technique Adjoint de Charles Chevalier. Puis, il occupe le poste de Directeur Technique de tous les Domaines étrangers (hors bordeaux) pour Barons de Rothschild. A partir de 2016, il décide de se consacrer à 100% au Château Lafite Rothschild et au Château Duhart-Milon. Je rencontre un homme passionné, connaissant dans les moindres détails Duhart-Milon dont le beau terroir est situé à l’ouest de Lafite Rothschild.
Gerda : Parlez-nous de vous…
Eric Kohler : Je suis le fils d’une famille d’agriculteurs qui est tombé amoureux du vin en découvrant Bordeaux et le Médoc.
Gerda : Quels sont les principaux défis auxquels vous êtes confrontés personnellement, dans la pratique de votre métier
Eric Kohler : Etre à la hauteur des attentes de tous les amateurs et de tous les consommateurs de nos vins. Faire des vins auxquels les gens s’attachent dans un contexte de Responsabilité Sociale et Environnementale (RSE).
La vendange 2021
Gerda : Comment se sont passées vos vendanges?
Eric Kohler : 2021 est certainement un millésime complexe, mais à Pauillac, nous avons produit des vins qui vont surprendre. C’est un style plus classique mais qui sera certainement compris par des amateurs de nos vins grâce aux cabernets sauvignons.
La marque Duhart-Milon aujourd’hui et demain
G : En quoi vos vins se distinguent, et sont uniques ?
Eric Kohler : Duhart-Milon a une particularité : son terroir produit des grappes mûres. C’était peut-être un désavantage il y a 30 ans. Les vins étaient sur la réserve et quelques fois aperçus comme austères. Aujourd’hui, avec le changement climatique et par conséquent le risque de sur-maturité, c’est un grand avantage. Duhart-Milon se porte très bien dans les millésimes très chauds comme 2003, pourtant difficile à Bordeaux. Duhart 2003 a encore une belle trame de fraîcheur. Comme 2009 et 2018 qui sont deux millésimes exceptionnels. Duhart-Milon est, grâce à son terroir, armé pour l’avenir !
G : Pourriez-vous me définir ce qu’est un vin exceptionnel ?
Eric Kohler : Un millésime est grand quand nous l’avons compris et accompagné. Nous sentons la force du millésime qui sera jusqu’au bout reconnue comme telle. Il doit procurer de l’émotion pour le consommateur. C’est différent de la qualité, le jour de l’ouverture de la bouteille est mémorable. C’est donc très personnel et dépend de beaucoup de conditions.
G : Laquelle de vos réalisations récentes aimeriez-vous faire partager à la clientèle ?
Eric Kohler : Le nouveau cuvier dans lequel nous avons vinifié le premier millésime 2020. C’est un magnifique outil hyper technique. Nous avons 45 cuves en inox tronconiques et 15 cuves en ciment.
J’aimerai vous parler aussi de notre vin blanc. Après des études très pointues, nous avons pris la décision de planter et surgreffer 5 hectares avec des cépages blancs : sauvignon et sémillon. C’est un processus très intéressant car les grands terroirs de blancs ne peuvent pas faire de grands rouges habituellement. Ce n’est rien de dégradant mais uniquement une question technique qui nous a fait faire des études poussées pour amener à ce beau projet. Le premier millésime sera le 2021. Saskia de Rothschild a lancé un concours interne DBR pour trouver le nom.
G : Sur quels projets futurs travaillez-vous en ce moment ?
Eric Kohler : Deux principaux :
– Nous sommes en train de créer un projet oenotouristique à Duhart-Milon. C’est un lieu unique au milieu de la ville de Pauillac. Nous pourrons recevoir des visiteurs fin 2022.
– Notre pôle Recherche et Développement, créé en 2016 pour tout DBR, travaille sur la viticulture de demain : comment nos vignobles doivent évoluer. Nous avons des parcelles sur lesquelles nous expérimentons de nouveaux cépages, de nouveaux modes de conduite de la vigne, la taille, la densité de plantation etc..
G : Où en est Duhart-Milon en matière de transition écologique ?
Eric Kohler : Nous sommes en conversion bio depuis 2021. Lafite Rothschild et Duhart-Milon seront donc certifiés en 2024. Même si cela n’est pas parfait, c’est la meilleure démarche à mener dans l’objectif de ramener à 0 le résidu dans le vin et pour la biodiversité. Il faut faire revenir le végétal et la vie dans nos vignes. Nous mettons aussi en place l’agroforesterie.
Gerda : Vous êtes à la propriété depuis plus de 25 ans, quels sont les plus grands changements depuis ?
Eric Kohler : Il n’y a jamais eu de bouleversement. A DBR, tous les changements sont des évolutions intelligentes durant lesquelles nous ne suivons pas de phénomènes de mode. La technique, la viticulture et la protection de l’environnement sont, aujourd’hui, encore plus poussées. La protection du vignoble est notre plus grande préoccupation.
G : Où seront les plus gros changements dans l’avenir proche ?
EK : Le vignoble va continuer à évoluer car il doit s’adapter aux changements climatiques : densité, encépagement… C’est la nouvelle problématique à laquelle nous sommes confrontés et nous devons l’affronter en essayant d’être encore plus respectueux de l’environnement. Quant au nouveau chai, il est construit pour les 30 ans à venir.
A DBR, il n’y a pas de grande révolution mais il n’y aura jamais de limite dans la capacité d’évolution !
G : Votre oenologue/conseiller est Eric Boissenot, pourquoi travaillez-vous avec lui ?
EK : Eric Boissenot est le porteur d’une belle école d’œnologie et de vinification. J’ai beaucoup appris avec son père Jacques. C’était un grand monsieur du vin.
J’ai confronté Jacques avec mes idées et je dois avouer que j’avais souvent tort. C’est enrichissant de comprendre le millésime ensemble et de porter le raisin vers ce qu’il a envie de nous donner, pas plus car le but n’est pas de faire un grand millésime tous les ans. Mais il faut tout mettre en place afin que le millésime puisse tout donner et s’exprimer. Nous sommes dans une période très intéressante et exaltante à Duhart-Milon !
Le mot du Directeur International des Châteaux : Les Domaines Barons de Rothschild, Jean-Sébastien Philippe
Gerda : Quel positionnement souhaitez-vous pour vos vins ?
Jean-Sébastien Philippe : Très important, nous voulons que chaque marque : Duhart-Milon, L’Evangile et Rieussec soient des propriétés fortes avec une vraie identité et que nous communiquions indépendamment. Chaque vin doit tracer son propre chemin, et sortir aussi de l’ombre de Château Lafite.
Notre ambition pour Duhart-Milon et de faire un vin distributif. Les bouteilles doivent arriver dans des caves, sur des tables de restaurants, des brasseries et bars à vin dans le monde. C’est un vin qui est connu par des professionnels mais pas encore assez chez le consommateur. Je voudrais que les gens ouvrent des bouteilles de Duhart-Milon et réalisent à quels points le terroir est exceptionnel !
G : Quels sont vos priorités en développement commercial ?
Jean-Sébastien Philippe : Nous avons une belle distribution en Chine et aux USA et cela est vraiment une chance. Nous devons maintenant faire de notre mieux pour que Duhart-Milon soit davantage distribué dans des villes secondaires et tiercières en Chine, mais aussi que nous puissions avoir une très belle distribution Européenne notamment auprès de la restauration et des cavistes. Duhart-Milon est aujourd’hui l’un des coup de cœurs du négoce et des professionnels du vin – et nous avons hâte de voir cette passion se transmettre chez les consommateurs.
Site internet et Réseaux sociaux
Les vins dégustés
Château Duhart-Milon 2016 : 70% cabernet sauvignon, 30% merlot
C’est le premier millésime d’Eric Kohler comme Directeur Technique. C’était une année chaude et sèche mais à aucun moment les tannins présents se montrent durs. Au nez, le vin a la typicité de Pauillac mais est encore sur sa réserve. En bouche, il a une droiture comme j’aime. Les tannins sont structurés et verticaux. Le vin a une longue finale et encore un grand avenir.
Château Duhart-Milon 2008: 67% cabernet sauvignon, 33% merlot
Ce Duhart est magnifique dans son classicisme. C’est pourtant un millésime frais. Comme Eric Kohler l’a bien expliqué, on aime son côté végétal donné par le cabernet sauvignon, pas trop mûr. Ce cépage apporte beaucoup de fraîcheur et d’élégance dans ce délicieux vin, droit, avec une forte personnalité.
Gerda BEZIADE a une incroyable passion pour le vin, et possède une parfaite connaissance de Bordeaux acquise au sein de prestigieux négoces depuis 25 ans. Gerda rejoint Roland Coiffe & Associés afin de vous apporter avec « Inside La PLACE » davantage d’informations sur les propriétés que nous commercialisons.