Cédric Roureau
Courtier depuis 1993
Président du Syndicat des Courtiers depuis 2020
Gerda : Parlez-nous de vous…
Cédric Roureau : Je suis un homme heureux et épanoui exerçant ce joli métier depuis 1993. C’est une profession très intéressante, riche qui m’a beaucoup apportée : je considère que j’ai beaucoup de chance de me lever chaque matin. Tous les jours sont différents.
Gerda : Quels sont les principaux défis auxquels vous êtes confronté personnellement dans la pratique de votre métier ?
Cédric Roureau : Démontrer notre valeur ajoutée car nous pourrions être perçus comme un échelon supplémentaire. Néanmoins, le courtier est un acteur central de la commercialisation des vins à Bordeaux comme il en existe dans d’autres régions viticoles française (Provence, Bourgogne, Champagne…). Notre rôle est de faire en sorte que les transactions se déroulent pour le mieux entre les châteaux et les négociants.
Le métier de courtier
Gerda : Combien de courtiers y a t-il à Bordeaux ?
Cédric Roureau : 78 qui sont membres du Syndicat à Bordeaux. Au total, nous sommes 97 courtiers enregistrés à Bordeaux et à Bergerac.
G : Pourriez-vous me décrire le rôle d’un courtier ?
CR : C’est une personne indépendante qui fait le lien entre la propriété et le négoce. Il n’a pas d’intérêt pour l’un ou pour l’autre. Il est fidèle à la Place de Bordeaux.
Le courtier est aux avant-postes pour déceler la qualité d’un millésime. Il passe régulièrement dans les propriétés pour goûter pendant les vendanges et tout au long de l’élevage du vin. Il sait très vite ce que sera la qualité du millésime. C’est une femme ou un homme de terrain, messager(ère) auprès de ses interlocuteurs, pour les informer de l’actualité des vignobles.
En complément de ce travail, il est au cœur des transactions journalières lui permettant d’établir des cours de Place sur l’ensemble des vins produits à Bordeaux. Le courtier signe seul le bordereau de confirmation d’achat, document qui officialise la vente.
Il existe à Bordeaux, deux types de courtiers :
1) Les courtiers dits « de campagne » dont le rôle est de sillonner les différentes appellations pour localiser les qualités et les volumes dans chaque chai. Le négociant mandate son(ses) courtier(s) en spécifiant le ou les vins recherchés. Celui-ci lui sélectionne les lots. Très rapidement, le négociant disposera d’un échantillonnage conséquent lui permettant de sélectionner la qualité désirée. C’est une aide formidable pour le négociant qui n’est pas structuré pour effectuer ses démarches.
2) Les courtiers dits de « ville » qui eux sont spécialistes dans les transactions de vins en bouteilles.
G : Est-ce que le rôle du courtier a évolué cette dernière décennie ?
CR : Oui nous sommes de plus en plus sollicités. Aujourd’hui, nous centralisons toutes sortes d’informations sur les vins. Nous accompagnons les négociants dans leurs demandes de documents (habillages, fiches, analyses, certificats, dates, dimensions, poids…) et tous les supports nécessaires à la vente. Même chose vis-à-vis des châteaux pour lesquels nous faisons des restitutions sur les échanges de Place (volumes, prix). C’est une évolution que l’on constate maintenant depuis plusieurs années avec une exigence sur la qualité des informations restituées. Le besoin en échantillons est également croissant. La nécessité de faire goûter les vins est toujours aussi importante : beaucoup souhaitent déguster les vins notamment pendant la fameuse semaine des primeurs. Cela nécessite une logistique bien rodée pour que nous puissions délivrer durant cette période un nombre d’échantillons très conséquent.
G : Que sont les principaux défis auxquels les courtiers sont confrontés ?
CR : Nous sommes dans un monde qui va très vite. Nous n’avons pas le choix, il faut nous adapter. Nous devons instantanément répondre aux sollicitations des uns et des autres. Nous avons beaucoup investi dans les ressources humaines et dans les systèmes informatiques pour pouvoir être le plus performant possible.
G : Pourquoi le courtier reste important dans les transactions ?
CR : Le courtier est l’intermédiaire qui formalise la vente à l’aide du bordereau de confirmation d’achat. A Bordeaux, il y a très peu, voire quasiment pas de litiges opposant un vendeur et un acheteur surtout lorsque l’affaire a été faite par l’intermédiaire d’un courtier. Ce système ne fonctionne pas si mal, depuis le temps il a démontré sa redoutable efficacité.
Le futur
Gerda : Pensez-vous qu’il va y avoir des changements dans le métier de courtier ?
Cédric Roureau : Nos métiers ont su et ont déjà beaucoup évolué et nous saurons, s’il le faut, nous adapter au monde de demain.
G : Sur quel(s) projet(s) le syndicat travaille en ce moment ?
CR : Notre syndicat représente la région où il y a le plus de membres en France. Notre actualité indépendamment de la représentation à travers les instances professionnelles et publiques est occupée entre autres par l’organisation de l’examen obligatoire pour exercer le métier de courtier. Nous avons depuis octobre 2020 des décrets d’application qui nous permettent de refaire passer des examens aux candidats désireux d’épouser notre profession. Depuis ce jour, nous avons eu 29 candidats qui se sont présentés : 22 ont été reçus. Ce sont souvent des collaboratrices ou des collaborateurs qui travaillent dans des bureaux de courtage et qui souhaitaient, pour une question de reconnaissance professionnelle, passer l’examen. C’est très réconfortant de voir que la jeune génération est attirée par ce métier.
G : Que pensez-vous de la tendance des vins bio/biodynamiques ?
CR : D’ici à 2024, 20% de notre superficie sera en bio. On parle donc de 20 000 hectares. C’est une vraie dynamique du vignoble bordelais qui a su prendre le sujet à bras le corps, malgré une climatologie pas toujours favorable. Il faut féliciter tous ces viticulteurs qui avec cet engagement font de Bordeaux le 1er vignoble bio. Les propriétés sont toujours plus méticuleuses dans leur approche culturale. Dans certains endroits, le vignoble ressemble presque à un jardin potager. Les changements engagés pour être plus respectueux de notre environnement sont véritablement incroyables.
G : Quels sont les cépages du futur pour vous ?
CR : C’est un sujet d’actualité étudié de façon méticuleuse par les organismes concernés. De nombreux essais sont menés pour déterminer ce que pourront être les futurs cépages annexes dans notre région.
Le vin
Gerda : Que pensez-vous de la notation des vins ?
Cédric Roureau : J’ai le sentiment que les négociants ont repris les choses en main, même si la note peut être une aide non négligeable. Les négociants sont aujourd’hui de véritables prescripteurs auprès de leurs fidèles clients.
G : Pourriez-vous me décrire un vin exceptionnel ?
CR : C’est un vin qui est lié à un moment, un lieu et des amis ! Je rajouterai que Bordeaux a ceci d’exceptionnel de pouvoir offrir un voyage dans le temps !
G : Pourriez-vous me donner votre impression du millésime 2021 ?
CR : C’est un millésime qu’il faut défendre. Nos viticulteurs ont effectué un travail formidable. Le millésime est très complémentaire de 2018, 2019 et de 2020. C’est un vin avec des bons équilibres, de la fraîcheur, de la longueur et de la persistance en fin de bouche. Il y aura de très bonnes bouteilles et les consommateurs seront surpris.
G : Pourriez-vous me donner un millésime mémorable à Bordeaux et pourquoi ?
CR : 2009 parce que tout était très bon. Quand vous ouvrez une bouteille de 2009, vous n’êtes jamais déçu. Il y a dans ce millésime une très grande homogénéité.
Gerda BEZIADE a une incroyable passion pour le vin, et possède une parfaite connaissance de Bordeaux acquise au sein de prestigieux négoces depuis 25 ans. Gerda rejoint Roland Coiffe & Associés afin de vous apporter avec « Inside La PLACE » davantage d’informations sur les propriétés que nous commercialisons.