Inside La Place – Vinum : le marché Suisse & les Grands Crus de Bordeaux

Daniel Basler

Directeur de VINUM SA


Certains clients peuvent devenir des amis fidèles, avec qui c’est possible de partager à la fois des moments mémorables autour de belles bouteilles et à la fois des discussions profondes sur tous les aspects de notre belle filière. Je parle de vrais échanges, même sur des sujets délicats, de conversations libres en toute confiance et avec du respect mutuel. Daniel Basler, Directeur de Vinum SA, est l’un de ces amis fidèles avec qui de telles discussions sont toujours enrichissantes. J’étais donc très heureuse lorsqu’il a accepté cet entretien par amitié pour Roland Coiffe.

Vous et votre entreprise

Gerda : Pourriez-vous présenter votre parcours personnel et pourquoi le vin ?

Daniel Basler : Après des débuts dans la gastronomie, une formation économique et des études de marketing, j’ai travaillé pour un géant suisse de l’industrie alimentaire. Cependant, ma passion pour le vin a été éveillée grâce à ma femme Nicole et sa famille qui possèdent un domaine viticole sur les rives du lac de Bienne. Depuis sa création en 1974, Vinum est synonyme de qualité et d’expertise en matière de vins. En tant qu’importateur historique suisse de Baron Philippe de Rothschild et de grands crus classés de Bordeaux, Vinum est spécialisé dans l’importation de vins prestigieux et rares du monde entier. Principalement axé sur les clients particuliers et les établissements gastronomiques haut de gamme en Suisse, Vinum a su se démarquer par sa capacité à proposer des vins exclusifs et de grande qualité.

Gerda : Quels challenges principaux rencontrez-vous sur votre marché : la logistique, la concurrence, les réglementations, la consommation, autre ?

Daniel Basler : La Suisse est historiquement un marché très exigeant, réputé pour sa rigueur en matière de vins de qualité, la concurrence est rude. Les défis sont multiples, qu’il s’agisse de la logistique, des réglementations, de la consommation ou de la concurrence acharnée entre les différents marchands de vin. Dans ce contexte, la clé du succès réside dans la capacité à identifier rapidement les tendances et les préférences des consommateurs.

Gerda : Comment la demande des grands Bordeaux a-t-elle évoluée ces dernières années sur votre marché et quelle est sa part dans votre activité ?

Daniel Basler : En termes de demande, les grands Bordeaux ont toujours été très prisés en Suisse, mais ces dernières années, la demande a connu une croissance constante, avec une préférence marquée pour une trentaine de châteaux particuliers. Pour Vinum, société spécialisée dans l’importation de vins prestigieux, les grands Bordeaux restent un pilier important en termes d’image et de qualité. Cependant, l’entreprise reconnaît également l’importance croissante d’autres pays viticoles, tels que l’Italie, l’Espagne ou les États-Unis, qui ont connu une forte progression ces dernières années.


Votre clientèle

 

Gerda : Quels sont les critères d’achat principaux de vos clients lorsqu’ils achètent des grands vins ? 

Daniel Basler : Le nom du domaine, le prix et les évaluations de la presse sont les critères déterminants.

Gerda : Quels influenceurs ou journalistes comptent le plus chez vos clients ?

Daniel Basler : En général, c’est Robert Parker et le Wine Spectator et spécifiquement pour la Suisse, le magazine Vinum et le Weinwisser.

Gerda : Le système des notes est-il toujours primordial lorsque les clients achètent du vin ?

Daniel Basler : Ça reste toujours un instrument très important, mais la communauté des rédacteurs doit aussi se poser la question de savoir si les évaluations toujours très élevées sont encore crédibles à l’avenir.

Gerda : La technologie peut-elle aider les producteurs à se rapprocher des consommateurs et est-ce un besoin ?

Daniel Basler : Avec les technologies modernes, il est aujourd’hui plus facile pour le producteur d’atteindre directement le client final, les appréciations des clients sur le vin pourraient être utiles pour le producteur.


Bordeaux et vous

 

Gerda : Quand on dit « Bordeaux », à quoi vos clients pensent-ils ?

Daniel Basler : Les clients pensent évidemment aux nombreux châteaux historiques qui produisent principalement des grands vins rouges.

G : Nos propriétés travaillent énormément sur les conséquences du changement climatique et sur la transition vers une agriculture plus respectueuse, quels sont les attentes réelles de vos clients en la matière ?

Daniel Basler : Je pense qu’il est clair pour nous tous que nous devons changer notre comportement par rapport à la nature, et la transition vers une agriculture plus respectueuse doit se faire. Le sujet de l’impact environnemental est en Suisse un thème prédominant chez les consommateurs mais aussi dans toutes les branches de l’économie.

G : Pour vous, sans tabou, quels sont les forces et les faiblesses de Bordeaux aujourd’hui ?

Daniel Basler : A mon avis, Bordeaux a principalement deux points forts :

  • D‘une part, la production des meilleurs vins rouges du monde.
  • D’autre part, la distribution via le négoce, qui permet aux châteaux d’être présents dans le monde entier avec un apport relativement modeste.

En revanche, j’estime que Bordeaux peut encore améliorer son service après-vente pour répondre aux exigences du monde du luxe. Les emballages ne sont pas toujours à la hauteur et le service après-vente est encore trop souvent inexistant en cas de problème sur une bouteille par exemple. En somme, Bordeaux doit encore s’inspirer des autres secteurs du luxe pour maintenir son rang et répondre aux attentes des clients.

G : Bordeaux a ses classements, sont-ils toujours des critères d’achat essentiels ?

Daniel Basler : Je pense que la classification est moins importante que par le passé, aujourd’hui le nom/la marque du château est beaucoup plus décisif dans le choix de nos clients.

G : Certains grands vins de Saint-Emilion ne se sont pas représentés au dernier classement, est-ce un problème pour vos clients ?

Daniel Basler : Ce n’est pas un problème, les producteurs concernés sont en mesure de se le permettre en raison de leur notoriété mondiale.

G : Ces dix dernières années, certaines marques ont progressé plus vite que d’autres. Pensez-vous qu’il existe encore des évolutions possibles dans la hiérarchie des Bordeaux ?

Daniel Basler : Il va certainement y avoir encore quelques châteaux qui vont progresser, mais je ne pense pas à une grande révolution de la hiérarchie des Bordeaux à l’avenir.

G : Pourquoi une étiquette est incontournable dans votre portefeuille ?

Daniel Basler : Il existe un certain nombre de vins dans le monde entier, qu’il faut avoir dans l’assortiment pour remplir la vitrine afin d’attirer les clients.

G : Est-il intéressant que la Place de Bordeaux vous propose davantage de vins hors de Bordeaux ?

Daniel Basler : Il est pratique pour nous, surtout pour des raisons logistiques, de pouvoir acheter à Bordeaux divers vins du monde entier.

Mais si je vois aujourd’hui le nombre de vins distribués par la Place, je me demande quels sont les critères de sélection. Bordeaux doit être plus sélectif dans ses choix.

G : Que devrait faire Bordeaux, châteaux ou négociants, qui pourrait contribuer à améliorer et à développer votre marché, et votre business ?

Daniel Basler : Les châteaux, bien sûr de continuer à produire des vins exceptionnels.

Les négociants pourraient être un peu plus proches des marchés, de ses clients, afin de transmettre les informations aux producteurs. Je me demande quelques fois si les Châteaux connaissent la vérité du marché ? Il faut oser se parler plus ouvertement.

Gerda BEZIADE a une incroyable passion pour le vin, et possède une parfaite connaissance de Bordeaux acquise au sein de prestigieux négoces depuis 25 ans. Gerda rejoint Roland Coiffe & Associés afin de vous apporter avec « Inside La PLACE » davantage d’informations sur les propriétés que nous commercialisons.